Le corps (re)traumatisé (prose)

Petit texte écrit lors d'une retraumatisation

Delphine Masset

1/1/20252 min read

Ca part de mes psoas ou de l'aine, quelque chose comme ça, ça rejoint mon sacrum, comme une etreinte angoissante qui me fait lever les fesses de ma chaise. J'ai envie de fuir. Par moment, cela remonte dans mon diaphragme. Toutes les quelques secondes je dirai, comme un flux. Ca informe d'une forme de terreur très primaire, et alors mes épaules se bloques, se ferment. Mon ventre, est-ce mon utérus ou mon gros intestin, est plein de vibrations inquiètes, et mes mains sont crispées: j'ai plus de mal à les ouvrir que d'habitude. J'ai envie de me mettre en position fœtus, de prendre un coussin et de l'écraser contre mon thorax. Et ne parlons pas de mes yeux, évidemment, qui se baissent, car il n'y a plus que terreur dans mon corps. 80% des sensations qui informent sont des sensations intérieures. Dans ces cas là, j'aimerais être libre de mes mouvements, ne pas travailler, aller chercher la joie où il en reste. Car dans ces cas là, il n'en reste plus beaucoup. Aller chercher les 20% de bonheur à l'extérieur de moi puisque cela ne va plus venir de l'intérieur, pour le moment. Sauver ma peau mes os mes muscles mes fascias qui se consument de l'intérieur. Se referment. Je vais devenir rabougrie avant l'âge. Je ne me sens plus pareille. Je ne suis plus la même. J'ai besoin d'aller me chercher ailleurs, me retrouver ailleurs. Mon moi est en dehors de moi, sous forme d'espoir, de possibilité. Il est à l'étranger peut-être, dans l'engagement social, dans une formation sur le trauma, mais pas ici, dans mon corps. Enfin c'est ce que je crois quand je ne peux pas bouger, que ma vie est enfermée par des obligations. Alors la vie se resserre autour de mon corps serré et c'est trop, c'est insupportable, c'est étouffant.

Demain je serai épuisée de cette petite lutte interne idiote mais exténuante. Agare...

Je m'étais obligée de ne plus parler de mon trauma. J'avais envie de changer de sujet. De prendre es vacances. De commencer à habiter un pays sans thérapeutes. Mais ça ne marche pas très bien... J'ai été réactivée il y a une semaine. Alors j'ai besoin d'y revenir, d'écrire encore et toujours sur ce sujet.